Tradition turkmène : les perspectives de l’élevage de chameaux
L’élevage de camélidés est, depuis l’Antiquité, l’une des activités traditionnelles des vastes étendues turkmènes. À l’époque des grandes caravanes qui sillonnaient les itinéraires de la Route de la Soie, les chameaux et dromadaires étaient particulièrement appréciés comme bêtes de somme pour leur résistance dans les traverses des vastes étendues désertiques. Mais c’étaient également des animaux d’élevage dont la viande et le lait sous différentes formes, notamment fermenté, représentaient une part non négligeable de l’alimentation des populations de ces contrées.
Il n’est donc pas surprenant que le programme de développement socio-économique du Turkménistan – qui prévoit la diversification de la production agricole et une augmentation de la rentabilité du secteur de l'élevage – tourne son attention vers cette activité séculaire. Des membres de l'Union des Industriels et Entrepreneurs travaillent activement sur ce segment. Ils considèrent l'élevage de chameaux comme une activité à fort potentiel de croissance.
Source de viande diététique, de produits laitiers et de laine, l'élevage des camélidés apparaît comme une source durable de développement des territoires désertiques du Turkménistan. Les pâturages et les ressources fourragères du Karakoum s'étendent sur plus de 35 millions d'hectares, ce qui représente une étendue considérable où les chameaux vivent en harmonie avec la nature depuis l'aube de l’histoire et ne violent pas son écologie. Les conditions de vie du désert, tout à fait acceptables pour les chameaux, sont incompatibles avec l’élevage d’autres animaux. Pour les éleveurs, il n’y a pas d’autre choix pour assurer leur survie. Même dans les zones plus clémentes mais difficiles d’accès où les moutons peuvent paître, les chameaux, capables de traverser des terrains sablonneux où la plupart des véhicules s’enliseraient, constituent des assistants irremplaçables des bergers dans les pâturages lointains.
Les chameaux turkmènes d'Arvan sont réputés pour leur rendement laitier élevé. En moyenne, le rendement en lait d'une chamelle pendant 18 mois de lactation atteint 2 500 kg de lait avec une teneur en matières grasses de 3,5 à 3,8 %. La race arvan se divise en deux types : l’occidental (Djebel) et l’oriental (Sakarchaguinski). Les bêtes du premier type, plus trapues, sont orientées vers la production de viande. Celles du deuxième type ont le rendement laitier le plus élevé. Leur croisement permet d'obtenir une ligne hybride avec une productivité améliorée.
C’est dans cette aventure que s’est lancé, depuis 2017, l’entrepreneur Polat Kanaïev, membre de l'Union des Industriels et Entrepreneurs. Il a créé une ferme sur 140 hectares dans le district de Geok-Depe, province d’Akhal. Dans ses enclos, il élève des animaux de race arvan dont le lait des femelles alimente son atelier de produits laitiers fermentés à partir de lait de chamelle.
Il a bénéficié du programme national de soutien aux producteurs agricoles qui lui a permis d’occuper la terre et d’obtenir des subventions grâce auxquelles il a acheté des équipements spécialisés de l’entreprise russe Pakka (Ijevsk). Cela lui permet de produire deux spécialités, le tchal (boisson lactée) et l’agaran (crème légère fermentée), particulièrement prisées par la population turkmène.
« Ces produits traditionnels font partie intégrante du régime turkmène », explique Polat Kanaïev. « Le tchal et l'agaran constituent depuis toujours une partie importante de la culture alimentaire turkmène en raison de leurs propriétés bénéfiques. »
Selon lui, le tchal a une faible teneur en calories, il contient beaucoup de vitamines et de micro-éléments qui en font un excellent agent diététique. Cette boisson apaise bien la soif et son goût est excellent. Chaque jour, sa ferme produit environ une tonne de tchal vendu dans la capitale, où elle est livrée dans des réfrigérateurs spéciaux. D’autres fermes du même genre fournissent un approvisionnement régulier.
L’ambition de Kanaïev est d’étendre son exploitation en profitant des aides de l’État et du climat favorable à l’investissement.
Dans le cadre de la politique d’État favorisant un mode de vie sain, les éleveurs prêtent une attention particulière à l'équilibre alimentaire. À cette fin, ils sont en relation étroite avec l'Institut d'élevage et de médecine vétérinaire de l'Université agricole du Turkménistan, dont les spécialistes conseillent et vaccinent les animaux.
Le soutien du Centre des technologies de l'Académie des sciences du Turkménistan a permis le lancement d’une start-up de production de lait de chamelle en poudre qui procède aux étapes expérimentales dans ce sens et qui obtient déjà de bons résultats.